Discographie

Victor Jara, le poète au chant libre – Michel Mainil 4tet et Lisa Rosillo

El derecho de vivir en paz
Manifiesto
Duerme Negrito
La cocinerita
Deja la vida volar

Vientos del pueblo
Canto Libre
Angelita Huenuman
Te recuerdo Amanda
Gracias a la Vida
Lo Unico que tengo

Lisa Rosillo (Chant) Michel Mainil (Saxes) Alain Rochette (Piano, arrangements) Nicholas Yates (Contrebasse) Antoine Cirri (Drums)                                                                              Recorded July 6 -9, 2020 – Travers Emotion TRA 025

Une petite piqûre de rappel ne fait pas de tort : le jazz n’est pas que du jazz, la musique n’est pas que de la musique. Par ses origines, par sa structure même, le jazz porte en lui une vision du monde rebelle, généreuse, libre, solidaire. Pour ceux qui ont l’âge de se souvenir des heures sombres du Chili, le nom de Victor Jara restera lié à cette lutte inégale contre la dictature du sinistre Pinochet qui, après l’avoir torturé sur la place publique lui fit couper les doigts. Le meilleur moyen de faire taire un artiste. Sauf que ses textes restent. Michel Mainil, infatigable défenseur d’une musique qui fut d’abord une musique d’esclaves, leur donne une couleur nouvelle, histoire de faire passer le flambeau de la résistance, en des temps où le fascisme pointe le bout de son nez un peu trop souvent. Avec Alain Rochette, directeur musical du projet, Nicholas Yates et Antoine Cirri, et avec, pour porter les textes de Jara, la voix de Lisa Rosillo, Michel, particulièrement efficace au soprano dans ce contexte, nous rappelle, à travers ce disque enregistré en juillet 2020, au cœur d’une autre forme de tempête, l’urgence de la résistance et du combat artistique. No pasaran ! Jean-Pol Schroeder – Directeur de la Maison du Jazz de Liège

Soul Voyage Michel Mainil / Vincent Romain Quintet

Summer is coming soon
First Light
Lime and chili
From self to self
Povo
Sunshine alley
Loran’s dance
No blues no more
Sweet jail

 

 

Vincent Romain (Guitare) Michel Mainil (Saxes) Maxime Moyaerts (Orgue) Olivier Poumay (Harmonica) Antoine Cirri (Drums)                                                                               Recorded July 17-20, 2017 – Igloo Records IGL298

Aujourd’hui, l’amateur de jazz jouit rétrospectivement de cent ans d’histoire, puisque le premier enregistrement remonte à 1917, avec L’Original Dixieland Jazz Band. En jouir et d’autres jouer, en s’adonnant à la réexploration créative, un mouvement qui fut déjà initié au début des années 1980 par les néo-boppers ; ici, les cinq protagonistes de Soul Voyage ont opté pour une certaine simplicité plutôt que pour les thèmes acrobatiques venus du be bop. Car le soul jazz, dans le sillage du hard bop des années 1950, recherchait la fraîcheur et l’efficacité communicative issue du gospel et du blues. Ses plus belles réalisations se sont déployées de 1960 à 1975, avec Jimmy Smith, roi du Hammond B 3, Horace Silver, Lonnie Liston Smith, Lou Donaldson, John Patton, Richard « Groove » Holmes, Grant Green, les frères Adderley, etc.

Soul Voyage, ce sont des complices de longue date – Michel Mainil et Antoine Cirri d’un côté, Olivier Poumay et Vincent Romain de l’autre –, et l’injection de sang neuf avec le bientôt trentenaire Maxime Moyaerts. C’est chaleureux, ça vibre d’un bout à l’autre et fera certainement vibrer la fibre nostalgique de ceux qui ont eu la chance de connaître ce temps. Il ne fallait cependant pas simplement copier/coller, raison pour laquelle un répertoire de compositions originales est proposé ici, mais avec un tour de force : quand je les découvris en concert la première fois, j’aurais juré entendre des morceaux inconnus de l’époque ! Respect de la tradition et inventivité voisinent aussi dans la formule instrumentale : saxophones ténor et soprano, batterie, guitare et surtout orgue Hammond pour la première, harmonica comme autre instrument à vent pour la seconde. On se délectera du groove de Povo et Lime And Chili, de la ballade Sweet Jail, du thème épuré de Sunshine Alley, ou encore de la valse From self to self qui rappelle l’ambiance de l’album « Affinity » de Bill Evans. Bon soul voyage !    Bernard Legros – Essayiste

Nouveau disque de Michel Mainil égal nouveau projet. Comme à son habitude, le saxophoniste natif de La Louvière s’est approprié, pour le restituer à sa façon, un style particulier, en l’occurrence le hard bop imprégné de soul qui fit les beaux jours du label Blue Note dans les années 60. Qui dit hard bop, dit aussi orgue Hammond et guitare électrique : on se souvient de ces thèmes jadis portés à incandescence par des organistes comme Jimmy Smith, Big John Patton ou Richard « Groove » Holmes associés à des guitaristes comme Grant Green, Boogaloo Joe Jones ou autres Kenny Burrell. Ici, l’orgue est joué par Maxime Moyaerts, originaire de Dinant, rencontré sur scène au sein du quartet Four Of A Kind en compagnie Guillaume Gillain tandis que la guitare est dans les mains de Vincent Romain.

La formule est simple et le quintet a un son fluide qui glisse tout seul dans les oreilles. Michel Mainil a un phrasé de soulman avec un gros son qui rappelle parfois Grover Washington Jr. (dont le morceau Loran’s Dance figure par ailleurs au répertoire) tandis qu’en arrière-plan, la guitare tricote des cocottes funky. Marqué par le blues et la soul, l’orgue Hammond groove tout du long que ce soit en solo ou en accompagnement. Le disque comprend deux reprises du trompettiste Freddie Hubbard dont le mythique First Light autrefois sorti sur CTI et une autre de Butch Cornell, Sunshine Alley, qui me rappelle la version de Stanley Turrentine sur l’album Sugar. Les nouvelles compositions écrites par les membres du quintet s’inscrivent sans hiatus dans le répertoire en respectant les codes du genre. Cette musique inclut toutefois un élément distinct par rapport aux groupes de hard-bop précités : l’inclusion d’un harmoniciste qui intervient ici en solo au même titre que le saxophoniste. Olivier Poumay distille de belles phrases mélodiques sur son orgue à bouche comme on s’en convaincra à l’écoute de sa propre composition, la ballade Sweet Jail dont le thème est aussi nostalgique que celui de la bande sonore d’un film romantique qui finit mal. Enfin, on ajoutera encore quelques mots pour souligner le travail efficace du batteur Antoine Cirri, complice de longue date de Michel Mainil puisqu’il participait déjà à son premier disque en leader, Water And Other Games, sorti il y a 15 années. Les fans d’un jazz proche de ses racines soul, blues et funky apprécieront cette musique chaleureuse qui, pour être sans prétention, n’en est pas moins entêtante et « pleine d’âme ». Moi, ça me sied !  Pierre Dulieu – Dragon Jazz

 

The Christmas Songbook  –  Lisa Rosillo & Michel Mainil Quartet

Lisa Rosillo (Vcl) Michel Mainil (Ts) Alain Rochette (Pno) Nicholas Yates (Cb) Christian Verlent (Dms)  Recorded february 2017 – Travers Emotion TRA 024

Have Yourself a Merry Little Christmas
Santa Baby
God Bless the Child
Here Comes Santa Claus
Christmas Song
Let it Snow ! Let it Snow ! Let it Snow
White Christmas
Jingle Bell Rock
Nature Boy
Silent Night
Santa Claus is Coming to Town

 

Voici déjà que nous arrive, bien en avance, un disque de Noël. Doté d’une pochette vintage digne de celles des disques Decca, RCA Victor ou Capitol dans les années 50, cet album offre quelques incontournables comme White Christmas, Silent Night ou Santa Claus Is Coming To Town autrefois chantés et popularisés par Bing Crosby mais aussi quelques titres moins connus ou oubliés. Parmi ces derniers, l’amusant Santa Baby de Javits et Springer jadis chanté par Eartha Kitt qui déroule malicieusement, à l’intention du père Noël, une interminable liste de cadeaux saugrenus comme une zibeline, une Chevy 54 convertible bleu clair, un yacht et une bague (Santa Baby I do believe in you) ou encore le nostalgique Nature Boy de Nat King Cole et son message d’amour éternel (The greatest thing you’ll ever learn is just to love and be loved in return).
Lisa Rosillo a une diction élégante et une voix chantante bien adaptée à l’interprétation de ces rengaines désuètes qui, en dépit de leur longue existence, font toujours rêver. Elle prend un accent insouciant à la Marilyn Monroe sur Santa Baby tandis que sur God Bless The Child, sa voix se laisse aller à des intonations à la Billie Holiday, retrouvant ainsi cette sorte de tristesse et de solitude qui était l’apanage de la plus grande chanteuse de jazz de tous les temps. Alain Rochette, compagnon de longue date de Michel Mainil, est au piano acoustique ou électrique pour une prestation imprégnée de jazz classique qui n’exclut pas de subtiles nuances. Par contre, la rythmique a été confiée à un nouveau tandem comprenant le contrebassiste Nicholas Yates (membre des Sidewinders avec Thomas Champagne) et le batteur Christian Verlent qui s’en tirent fort bien en délivrant un soutien frais et dynamique, quand il n’est pas carrément propulsif comme sur le joyeux Here Comes Santa Claus. Quant au leader du quartet, son jeu de saxophone est comme d’habitude d’une grande maturité même s’il est ici plus cool et velouté que d’habitude, beaucoup plus proche par l’esprit d’un Lester Young que d’un Sonny Rollins. On peut aussi l’entendre virevolter à la clarinette sur Silent Night, un autre morceau au tempo enlevé des plus agréables.
Cet album, qui fait honneur à l’ambiance sereine des jours de Noël, suscite un bonheur semblable à celui ressenti quand, une fois par an autour du sapin illuminé, on ouvre un bon champagne entouré d’amis. Pour l’originalité du projet, ça se discute mais quant au plaisir qu’on en retire, il est irrécusable.  Pierre Dulieu – Dragon Jazz

La ville de la Louvière, située entre Mons et Charleroi, peut être considérée comme l’un des berceaux du surréalisme. M’enfin, pas seulement ! C’est là que naquit Michel Mainil, un irréductible saxophoniste, et excellent pédagogue (je l’ai découvert lors d’un stage en août dernier à Virton, où se tient également le festival « Jazz en Gaume »).
Or dernièrement la presse belge s’est entichée de son dernier disque « The Christmas Songbook ». L’intitulé peut sembler rebattu, cependant les standards sont revisités avec fraîcheur et légèreté. Tels des petites gorgées de bière, Pils ou autres, à savourer …(clin d’oeil à Philippe Delerm, et son manuel du bonheur à l’usage des gens trop pressés).
Prêt à braver draches et frimas afin de diffuser/ infuser moult notes chaleureuses dans les chaumières pendant les fêtes, Michel Mainil a pris le temps de parcourir le Royaume, entouré de ses comparses, à savoir Alain Rochette (pn), Nicholas Yates (cb), Christian Verlent (dms) ainsi que de la charmante chanteuse Lisa Rosillo. Notons que Lisa, d’origine hispanique, avait déjà collaboré avec le saxophoniste dans l’album « Spanish Jazz Project » (2014). Véronique Pinon – CultureJazz.fr

Spanish Jazz Project  –  Lisa Rosillo & Michel Mainil Quartet

Lisa Rosillo (Vocals) Michel Mainil (Bs, Ss) Alain Rochette (Piano) José Bedeur (Double bass) Antoine Cirri (Drums)    Recorded by Mario Benvenuto July 16th & 17th 2013  Mastered by Michel Andina   Travers Emotion TRA 022

El Quinto regimiento
Guantanamera
Angelitos Negros
No Sabes de Amor
Sabor a mi
Besame Mucho
Un Año de Amor
Quien Será
Piensa en mi
Hasta Siempre…

 

 

Le jazz vocal, surtout féminin, a ceci de prodigieux: il balaie d’un revers de refrain toutes les appréhensions qu’un mélomane peut avoir face au jazz. Une voix a ainsi le pouvoir d’extraire un combo de son environnement élitiste et de lui assurer une écoute plus large hors de sa catégorie habituelle. Si la musique est bonne bien sûr. Mais en s’associant avec la chanteuse Lisa Rosillo et en choisissant d’interpréter un répertoire de chansons hispaniques, Michel Mainil a mis en plein dans le mille. Non seulement, Lisa Rosillo pose sa voix profonde avec autorité sur la musique mais elle enthousiasme par sa justesse et son expressivité sans parler de son phrasé exotique élevé au biberon du flamenco qui fait passer des rayons de soleil à travers les volets.
Le répertoire comprend quelques standards inévitables dans un tel contexte (Guantanamera et Besame Mucho) mais aussi d’autres titres moins connus et fort bien choisis comme C’est Irréparable (Un An D’amour / Un Ano De Amor) de Nino Ferrer ; le traditionnel El Quinto Regimiento (Le 5ème Régiment) dédié à l’instrument de lutte contre le fascisme fondé par le Parti Communiste espagnol ; le méconnu Angelitos Negros (Anges Noirs), à l’origine un boléro composé par le Mexicain Manuel Alvarez Maciste autour d’un poème vénézuélien contre la discrimination raciale ; la célèbre chanson Sabor A Mi (Le Goût De Toi) du Mexicain Alvaro Carillo qui fut repris dans le film d’animation Chico & Rita ; Piensa En Mí (Pense à Moi) composé en 1937 par le Mexicain Agustín Lara et inclus dans la bande sonore du film Talons aiguilles de Pedro Almodóvar; et enfin le superbe Hasta Siempre (Pour Toujours) écrit en 1965 par Carlos Puebla en hommage au Che et à la révolution cubaine.

Heureusement, le piège des tapis de cordes et les clichés qui en découlent ont été évités et c’est bien un vrai groupe de jazz qui officie derrière la chanteuse. Les interventions du pianiste Alain Rochette sont lumineuses (écoutez-le jouer sans rythmique sur El Quinto Regimiento) tandis que le saxophone baryton du leader se glisse avec sensualité dans l’univers envoûtant de ces chansons latines, semant le trouble avec une ferveur entêtante et cette énergie libertaire qui enflammait jadis les chorus de Coltrane et Rollins. Beau travail aussi d’Antoine Cirri à la batterie, qui gronde ou caresse avec un art consommé de la percussion féline, et du contrebassiste José Bedeur qui n’hésite pas à jouer de l’archet quand c’est nécessaire comme sur le poignant Angelitos Negros. Ce Spanish Jazz Project n’a rien à voir avec certaines œuvres latines aseptisées que beaucoup de jazzmen enregistrent pour des raisons commerciales. Ici, la passion, l’émotion et le saudade vibrent sous chaque note tandis que la musique s’étire en un long souffle coloré. Il faut dire que ces mélodies hispaniques charrient une profonde nostalgie souvent connectée à des pans d’histoire tragique (Charlie Haden l’avait bien compris lui qui en réutilisa quelques unes en 1969 dans le cadre de son propre activisme politique). Cela vous donne même envie de connaître le message de ces anciennes chansons revisitées avec une étonnante fraîcheur.

Bref, on sort bouleversé de l’écoute et tout le monde le sait : quand le charme d’un disque opère, c’est qu’il a quelque chose de magique !  Pierre Dulieu – Dragon Jazz

S’il est bien une musique qui a pu facilement assimiler l’empreinte d’autres cultures, c’est le jazz.Tout d’abord par ses rythmes syncopés issus du cœur de l’Afrique. Ensuite, au fil du temps, par l’apport constant d’autres influences.Que ce soit du Brésil avec la bossa nova, du rock avec le rhythm and blues ou la fusion, ou encore des folklores de nombre de pays, les musiciens de jazz ont toujours laissé grande ouverte la porte aux cultures de toutes origines.                                                                                                                        C’est le cas de ce quartet. Rodés aux expériences les plus diverses, ils se sont cette fois orientés vers un répertoire résolument tourné vers la culture hispanique. Leur rencontre avec la jeune et talentueuse Lisa Rosillo n’y est pas étrangère. Ainsi, de Guantanamera à Quien Sera, des classiques du cinéma latino américain à Almodovar en passant par un témoignage des chants révolutionnaires de la Guerre d’Espagne, le groupe nous dresse une esquisse tout en couleur et aux accents jazzy de la langue la plus chantante qu’il soit.  Michel Mainil

 

If you missed the beginning…  Michel Mainil New Quartet

Michel Mainil (Ts) Peter Hertmans (Guit) Christophe Devisscher (Cb) Bruno Castellucci (Dms)                                                                                                                                 Recorded live at the Music Village (Brussels) from July 7th to 11th 2015 Recorded by Mario Benvenuto – Mixed and mastered by Michel Andina   Travers Emotion TRA 023

Night dreamer (Wayne Shorter)
Strode rode (Sonny Rollins)
Soul eyes (Mal Waldron)
Serenity (Joe Henderson)
Simone (Frank Foster)
Secret Love (Sammy Fain)
It never entered my mind (Richard Rodgers)
DC Blues (Peter Hertmans)
Cedar’s Blues (Cedar Walton)

 

Si vous avez raté le début…

Au-delà de ses talents de saxophoniste amoureux de Rollins et de Coltrane, Michel Mainil nous rappelle ici deux de ses principales qualités: la pertinence avec laquelle il construit son répertoire et l’excellence du choix de ses partenaires.

Pour respecter l’air du temps et les desideratas des producteurs, beaucoup de jazzmen s’obligent aujourd’hui à jouer au compositeur, même s’ils n’en ont pas vraiment l’étoffe. Point de cela ici, sa grande connaissance du jazz et de son histoire permettent à Michel Mainil de nous proposer un choix de thèmes d’une qualité d’écriture indéniable.

La grande idée de ce projet est d’avoir installé à la tête de la section rythmique un musicien bien trop peu souvent placé sous les projecteurs: Peter Hertmans, qui est ici tout simplement impérial. Point barre. Dans un contexte live sans filet, sans en faire trop, il nous offre une série de chorus d’une qualité exceptionnelle, nous rappelant qu’un grand modeste peut aussi cacher un musicien magistral. Ajoutez à la sauce le talent fait de classicisme et d’ouverture de Christophe Devisscher et de Bruno Castellucci, et vous aurez une idée du groove qui sous-tend ce nouvel épisode des aventures de Michel Mainil au pays du jazz éternel. Jean-Pol Schroeder, Directeur Maison du Jazz de Liège

Un nouveau disque du saxophoniste Michel Mainil, c’est toujours l’assurance de passer un bon moment. Non seulement, l’homme est un souffleur de première qui s’inscrit par sa technique et son énergie dans la filiation de ténors comme Coleman Hawkins, Sonny Rollins et John Coltrane mais ses projets sont à chaque fois bien pensés et suffisamment différents d’un disque à l’autre. Ainsi après l’excellent Spanish Jazz Project de l’année dernière, voici If You Missed The Beginning enregistré en concert avec un nouveau quartet au son moderne. Car en plus de la rythmique pétillante composée de Christophe Devisscher à la contrebasse et du vétéran Bruno Castellucci à la batterie, Mainil a fait appel au guitariste Peter Hertmans qui colore la musique de sa sonorité particulière, quelque part entre Bill Frisel et John Abercrombie. Mis à part DC Blues écrit par Hertmans, tous les titres sont des reprises de thèmes empruntés aux plus grands noms du jazz si bien qu’on n’a aucun effort à faire pour s’habituer à de nouvelles grilles d’accords. On est tout de suite dans le bain, au coeur d’une musique qui tourne à plein régime.

Le très beau Night Dreamer de Wayne Sorter, premier titre du répertoire, séduit d’emblée. Dans ce quartet sans piano, c’est la guitare qui fait les harmonies quand elle ne s’envole pas en de belles improvisations cohérentes, solides et sans effets inutiles. Strode Rode de Sonny Rollins est le véhicule idéal pour le saxophoniste qui peut laisser libre cours à sa verve naturelle et rendre ainsi hommage à l’un de ses plus évidents inspirateurs. Un autre grand moment est la ballade Soul Eyes de Mal Waldron, enregistrée jadis par le tandem de ténors Bobby Jaspar et John Coltrane, ici transcendée par le lyrisme des deux solistes et leur interaction. Quant à DC Blues, il se situe dans un style post-bop cohérent avec le reste et donne l’occasion à Michel Mainil d’extrapoler avec ferveur un solo d’anthologie de plus de trois minutes. Avec une classe authentique, son discours galvanisé par une rythmique implacable est marqué aussi bien par la tradition d’une approche mainstream que par l’intensité du jazz libertaire.

Serenity est un titre que Hertmans connaît bien pour l’avoir joué il y a une vingtaine d’années dans une configuration similaire avec Ode For Joe. La version avec Jeroen Van Herzeele était superbe et celle-ci ne l’est pas moins, ce thème de Joe Henderson étant un formidable tremplin pour les deux solistes. Ça boppe encore du tonnerre avec le Cedar’s Blues du pianiste Cedar Walton et dans le feu de l’action, tant la prise de son et la précision des musiciens sont exceptionnelles, on a déjà oublié que ce disque a été enregistré sur scène (donc sans filet, même si une sélection a été opérée pour choisir les meilleures prises des différents concerts), ce que vient nous rappeler en finale les applaudissements peu nourris mais enthousiastes du public du Music Village. Depuis Water And Other Games sorti en 2004, Michel Mainil n’a enregistré que des bons disques mais cette dernière production a vraiment une pêche d’enfer!                                     Pierre Dulieu – Dragon Jazz

Reflections in Blue   Michel Mainil Quartet

Michel Mainil (Ts, Ss) Alain Rochette (Pno) José Bedeur (Cb) Antoine Cirri (Dms)

Rec. live at the Music Village (Brussels) from August 4th to 8th 2009
Recorded by Michel Andina   Travers Emotion TRA 020

Reflections in Blue (James Williams)
Footprints (Wayne Shorter)
Beija Flor (Nelson Cavaquinho)
Mishima (David Schnitter)
I loves you Porgy (George Gershwin)
Just a Closer Walk with Thee (Traditional)
Get Out of Town (Cole Porter)

 

 

C’est avec un immense plaisir que nous retrouvons le saxophoniste belge Michel Mainil au top de sa forme pour son dernier album “Reflections in Blue”, enregistré en live au Music Village de Bruxelles. Un Michel qui se frotte avec brio à un répertoire nettement plus traditionnel et classique, bien loin de son précédent opus qui – il faut bien le reconnaître – nous avait laissé un peu sur notre faim.

Rien que du beau et même du très beau dans le choix des morceaux, car avec des auteurs comme Cole Porter, Gershwin, Wayne Shorter, seule la qualité ne peut être qu’au rendez-vous! Mais outre le choix judicieux des pièces musicales, c’est surtout au niveau de l’interprétation qu’il faut distribuer des bons points. En effet, Michel joue avec des musiciens qu’il connaît bien; à savoir le surprenant pianiste Alain Rochette, le facétieux et toujours omniprésent José Bedeur à la basse, sans oublier le batteur Antoine Cirri, complice de longue date du saxophoniste louviérois.

Quant à Michel Mainil, qui reste une des belles pointures du jazz belge, il se lâche totalement dans cet album afin de nous offrir un son bien rond, surtout plaisant à écouter, et présentant cette magie de nous interpeller dès les premières notes.
Reflections in Blue est un excellent album, riche de couleurs différentes et agréable à parcourir. Une belle production avec un son de qualité, destinée tout autant aux néophytes du jazz qu’aux connaisseurs. Petit bémol, pour ceux qui connaissent le club, l’absence des paroles de présentation de Paul Huygens, Mister Music Village, symboles d’accueil et de cette douce atmosphère ressentie dans le plus beau club de Bruxelles.
Mais ce détail ne gâche en rien le plaisir de se laisser guider par la belle musique du quartet de Michel Mainil dans Reflections in Blue, un album décidément à découvrir. Etienne Payen – Critique de Jazz

Un soir d’été à Bruxelles. Un club sympa dans une vielle maison du XVIIème au coeur de la capitale. Lumières tamisées, acoustique feutrée et sur la scène, quatre hommes soudés par l’étroitesse du lieu jouent une musique intemporelle. Car si sur son disque précédent, Between The Two Solstices sorti en 2006, Michel Mainil osait quelques bidouillages sonores, il est ici revenu à un jazz pur et pétri de tradition. Pour ce faire, il a réuni autour de lui une solide phalange apte à défendre ses valeurs. Au piano, Alain Rochette est totalement en phase avec son leader qu’il connait par coeur tandis que la rythmique, composée du contrebassiste José Bedeur et du batteur Antoine Cirri, fournit la nécessaire pulsion. Dès Reflections In Blue, une composition du pianiste James Williams pour Art Blakey et ses Messengers, on est tout de suite dans l’ambiance. Après une introduction batterie / basse / piano installant un irrésistible shuffle, le saxophone ténor décline l’inimitable mélodie et on est dans le vif du sujet. Blakey savait toujours quand un nouveau morceau avait le swing qu’il lui fallait et, à première vue, Mainil aussi. On hoche la tête, on claque des doigts, on tape du pied et on danserait presque tant cette musique est chaloupée. Bedeur y prend un solo de basse remarquable et remarqué par un public déjà conquis. Footprints, le merveilleux thème de Wayne Shorter qui vient ensuite, est rendu avec la plus grande sensibilité, le soprano s’envolant haut pour des improvisations inouïes. Quel plaisir aussi de redécouvrir Mishima composé par le trop méconnu David Schnitter, un saxophoniste ténor hard-bop qui officia chez les Jazz Messengers dans la seconde moitié des années 70. Le solo de batterie de Cirri, en introduction de ce second titre extrait de l’album Reflections In Blue d‘Art Blakey, en ferait presque oublier l’original. Et quand démarre Beija Flor (colibri) du brésilien Nelson Cavaquinho, avec son subtil parfum latin, on sait que c’est gagné : les musiciens donneront tout ce qu’ils ont et on passera une soirée inoubliable. Le plus étonnant est qu’on ne trouvera ici aucune composition nouvelle mais ce n’est pas grave puisque même les standards les plus éculés comme I Loves You Porgy de Gershwin ou Get Out Of Town de Cole Porter retrouvent une nouvelle fraîcheur. Quant au traditionnel Just A Closer With Thee, un antique gospel joué jadis à la Nouvelle Orléans pendant les marches funéraires, prenez-le comme un clin d’oeil à tout ceux qui aiment le jazz sans césure depuis ses origines. Tout comme Sonny Rollins, Michel Mainil a un gros son bien épais mais il le module avec la plus grande souplesse.Pierre Dulieu – Dragon Jazz

Le saxophoniste belge Michel Mainil est en pleine forme sur cet album enregistré live au Music Village, le club de Bruxelles. Du jazz simple, chaleureux, bien servi par José Bedeur, Alain Rochette et Antoine Cirri. Plus des morceaux classiques composés par Shorter, Gershwin ou Porter. Plus un son bien saisi sur le vif. Egalent une heure de grand plaisir d’écoute. Jean-Claude Vantroyen – Le Soir

These Foolish Things   Tany Golan & Michel Mainil Quartet

Tany Golan (Vcl) Michel Mainil (Ts, Ss) Alain Rochette (Pno) José Bedeur (Cb)
Antoine Cirri (Dms). Rec. live at Maison de la Laïcité de Morlanwelz November 19th, 2010

The Man I Love
These Foolish Things
On the Sunny Side of the Street
All the Things You Are
Willow Weep For Me
Good Morning Blues
Summertime
I Loves you Porgy

 

 

 

Dans les années septante, Benoît Quersin, personnage phare du jazz européen, créait en la Galerie des Princes, le « Blue Note ». Alechinsky avait dessiné le sigle du club. Un après-midi d’été, j’entendis une voix venue du bureau de Benoît où était installé un piano. Bassiste de haut vol mais également pianiste, il accompagnait une chanteuse que j’entendais pour la première fois, Tany Golan. Jamais je ne devais l’oublier.

Par après, je me souviens l’avoir entendue avec le trio du pianiste Johnny Hot, puis surtout lors d’une télévision à Londres avec le big band de Jack Parnell. Elle faisait éclater l’écran. Une carrière internationale allait-elle s’ouvrir à elle ? Tous les éléments étaient réunis : la présence, l’aisance, la décontraction et un swing intense. Son nom n’a guère l’évidence qu’il mérite.

A l’instar de tous les talents vrais, Tany doute d’elle-même. Elle est apparemment inconsciente de ce qu’elle représente pour nombre de musiciens. Sa modestie réelle a néanmoins constitué un frein à sa carrière. A-t-elle vraiment voulu faire carrière ? Rien n’est moins sûr. Lorsqu’à la RTBF, dans la « Troisième Oreille », je passe inlassablement le seul petit 45 tours que je possède d’elle, les réactions s’avèrent multiples et toujours enthousiastes.

Tany demeure discrète et silencieuse, alors qu’elle a tout à dire encore. Sans doute l’artiste véritable ne livre ses énigmes qu’en filigrane ? Grâce à des êtres tels que Tany Golan, le jazz préserve sa véritable densité poétique, donc son secret. Il serait bon de ne pas attendre des années pour s’en apercevoir… Il est temps que Tany Golan devienne Tany Golan. Marc Danval – Journaliste RTBF

Between the Two Solstices    Michel Mainil Enter Project

Michel Mainil (Ts, Ss, Alto cl.) Cécile Broché (Violin) Alain Rochette (Pno)
José Bedeur, Patrick Joniaux (Cb) Chris Joris (Perc) Antoine Cirri (Dms)
DJ Landzar (Scratches, Turntablism)

Recorded at La Fabrique de Théâtre (Frameries) from Oct. 31st to Nov. 4th 2005
Recorded, mixed and mastered by Michel Andina
Igloo Records IGL 188

Long distance (Erwin Vann)
Et résilles (Alain Rochette)
Hedge cut (Chris Joris)
Between the two Solstices (M. Mainil)
Italian party (Cécile Broché)
Special terms (Mainil – Rochette)
Carillon (José Bedeur)
Ajax (Dedicated to Sophocle) (Mainil)
Demain 10 heures (Eloi Baudimont)

 

Mainil donne immédiatement le ton avec en ouverture «Long Distance», une composition d’Erwin Vann. Les scratches de DJ Landzar et le violon de Cécile Broché forment un ensemble aigu mais malgré tout harmonieux.

Le premier temps fort est une composition de Chris Joris, « Hedge Cut » : les rythmes africains de Chris Joris aux percussions s’invitent à ceux d’Antoine Cirri à la batterie sur un Mainil très Coltrainien.

La composition éponyme de Mainil « Between the Two Solstices » donne beaucoup de place à DJ Landzar qui, avec ses platines et scratches, en plus des percussions et violon,  crée une atmosphère à la Pink Floyd. Alain Rochette au piano et José Bedeur à la basse complètent ces passionnants échanges riches en couleurs.

Avec sa compo personnelle « Ajax »  et « Special Terms », co-signée par Alain Rochette, Mainil laisse flotter la sonorité chaude du saxophone sur un irrésistible afro-beat swing. Et cela prédomine sur tout l’album.

Avec des distorsions audacieuses  qui sont parfois hors tonalité et des tensions qui s’ajoutent, écoutez la composition « Italian Party » de Cécile Broché pour entendre combien le violon peut sonner jazzy. Bernard Lefèvre – Jazz Mozaiek (traduit du néerlandais)

Passerende vliegtuigen, telefoongerinkel, een kinderstem: saxofonist Michel Mainil houdt van een vreemd geluid bij zijn muziek. Op zijn cd Between the Two Solstices verraadt hij een brede interesse en een fijn gevoel voor het combineren van verschillende invloeden. Afrikaanse dynamiek bijvoorbeeld, niet alleen tastbaar in de bijdragen van percussionist Chris Joris, maar ook altijd onderhuids in het ritme aanwezig. In de vormgeving van dat ritme speelt pianist Alain Rochette een onschatbare rol.

De plaat intrigeert ook door de aparte combinatie van instrumenten met onder meer viool (Cécile Broché) en turntables (dj Landzar), geluiden die telkens een zachte kriebeling aanbrengen onder de tamelijk traditionele jazzcomposities. Dj Landzar is een ontdekking: hij vermijdt de typische brutaliteiten en nestelt zijn klanken subtiel tussen de plooien van de muziek, een beetje zoals vogelgezang de dageraad kan versieren. Een heel interessante plaat van bij ons over de grens. Didier Wijnants – De Morgen

Water and other Games    Michel Mainil Quartet

Michel Mainil (Ts, Ss, As) Alain Rochette (Pno) José Bedeur (Cb) Antoine Cirri (Dms) Recorded at Pecrot in 2003 – Aram 2003 – 101

Beatrice (Sam Rivers)            Nemesis (Dave Holland)               Fee-Fi-Fo-Fum (W. Shorter)     Monk’s dream (Th. Monk)              Bas de laine (Alain Rochette)     Water and other games (M. Mainil)  Girl Talk (Neal Hefti)              Margarine (Hal Galper)                 When it’s sleepy time down south  Glup (Bedeur)

 

Depuis vingt ans, le jazz belge n’a jamais connu une telle floraison de talents, révélés ces dernières années avec Phil Abraham (trombone), Philippe Aerts (basse), Fabrice Alleman (saxophone ténor et soprano), Stéphane Galland (batterie) ou Ivan Paduart (piano). Cette énumération dictée par une mémoire hâtive, ne peut être exhaustive. D’autres musiciens méritent d’y paraître. A commencer par le saxophoniste Michel Mainil, entouré dans son dernier CD d’orfèvres rythmiciens : Antoine Cirri (drums), José Bedeur (basse) et le pianiste Alain Rochette au jeu beaucoup plus vitaminé que jadis. Mainil se différencie en n’adoptant guère un langage systématiquement calqué sur celui de John Coltrane. Dernier génie du jazz certes, mais il devient lassant d’entendre les jeunes saxophonistes manger un peut trop goulûment dans son assiette et accoucher de lambeaux convulsifs. Les prémices du jeu de Michel Mainil nous font remonter à Coleman Hawkins, avec les chuchotements de Ben Webster, en passant la rugosité d’un Gene Ammons ou de Arnett Cobb, tous deux dédaigneux des notes de neige. La précision horlogère de « Margarine » séduit, les dérapages contrôlés de « Béatrice » accélère le plaisir d’écoute. Quant au son « très Sidney Béchet » de « When it’s sleeping time down south », il prouve l’écoute attentive des maîtres à laquelle s’est livré Mainil, peu enclin à se laisser porter par l’opportunisme des modes. Marc Danval – Le Soir Magazine

Michel Mainil a une double personnalité. Derrière son côté affable, aimable, toujours à l’écoute des autres, bien ancré dans son rôle de responsable des programmes du Centre Culturel de La Louvière se cache un jazzman. Un vrai, un pur. Peut-être même sa vraie identité! Une personnalité qui éclate totalement, sans aucune retenue dans son dernier album “Water and other games”.

Peut-on le comparer à Sonny Rollins lorsqu’il tire de son saxo un son aussi chaleureux et feutré ou à John Coltrane lorsqu’il se met à le faire souffrir pour en sortir des sonorités audacieuses. Poser la question, c’est déjà y répondre. Et il y a pire comme comparaison .
Du jazz, du beau jazz! Somme tout très classique mais drôlement bien ficelé.
Des reprises de Wayne Shorter, de T.Monk, ou de Sam Rivers; des compositions originales du quartet et un accessit pour celle de Michel qui en débutant l’album en donne directement le ton. Mais parlons de l’accompagnement. Alain Rochette au piano s’adapte parfaitement bien aux différentes atmosphères de l’album et ce par un jeu précis, rythmé et vigoureux à souhait. José Bedeur à la contrebasse impose avec la régularité du métronome le tempo et le batteur Antoine Cirri vibre parfaitement bien à l’unisson du quartet.

Quant à Michel Mainil, en parfait leader, il sait s’imposer tout en laissant suffisamment d’espace aux autres musiciens. Pas de notes inutiles, le respect d’une tradition acquise par sa longue expérience de sideman en Belgique et à l’étranger.
Un musicien en pleine maturité, que l’on sent bien dans sa peau, digne de figurer parmi le gotha du jazz européen. Une étape supplémentaire qui lui donnerait l’assurance nécessaire pour se laisser aller dans des compositions plus fortes, encore plus osées.
Mais il faut laisser le temps au temps. Et ne boudons pas le plaisir d’écouter cet excellent album et de découvrir un autre visage de Michel Mainil. Celui du plaisir! »Waters and other games ». A savourer rapidement . Etienne Payen – Critique de Jazz

Voilà une musique bien internationale pour du jazz 100 % belge ! J’écris çà parce que ce quartet est l’inusable formule qui fit la gloire des Stan Getz , Coltrane et Wayne Shorter (sur disques only) à leur époque de gloire (sic !): sax ténor plus piano/ basse/ batterie et que cette musique est jouée dans le monde entier. Et rien ne me dit à l’écoute qu’il s’agit de musiciens enregistrés à Osaka, Honolulu ou Istanbul tant cette musique est universelle. Bouf et alors ?

Alors, je dois dire que dans son genre Michel Mainil est un connaisseur. D’abord, il y a pas d’esbrouffe technique m’as – tu – vu. Deuxio c’est le versant décontracté de cette musique sans crispations ni durcissements. Cela permet de faire passer l’émotion dans le swing, le chant de la contrebasse (Bedeur), le son naturel de la batterie (Cirri), le toucher du pianiste (Rochette) et les harmoniques  du ténor du chef ( le lideur!) admirablement intégrées au propos du saxophoniste.

C’est un connaisseur le chef, je vous dis, quand on considère le répertoire. Béatrice de Sam Rivers, Girl Talk de Neal Hefti, Monk’s Dream, Fee-Fi-Fo-Fum de Wayne, Dave Holland et Hal Galper. Tout ça me fait penser que Sam Rivers a joué longtemps avec Dave Holland, a enregistré avec Hal Galper (chez Blue Note, introuvable) et a précédé Wayne chez Miles en 1963 (Miles in Tokyo, Sony Japan, 1976). Les contributions personnelles de Bedeur, Rochette et Mainil complètent astucieusement ce tour d’horizon du quartet avec sax ténor sous de multiples angles de vue.

En plus, le bassiste c’est moderne sans jamais donner dans le dégoulinant, le lafarisme affairé de ceux qui parmi ses collègues jouissent d’attirer sur eux la lumière des projos, attitude hors de propos ici et qui me dégoûte d’ailleurs ailleurs. Le batteur, c’est pareil ,le bon goût , j’vous dis. On termine avec le clin d’œil narquois de When it’s Sleepy Time Down South, parce que ces types ne se prennent pas au sérieux. (Mais là tu y vas un peu fort, Antoine ! ). Les organisateurs de concerts de jazz auront raison d’engager ce groupe et vous de l’écouter dans votre salon. Je m’arrête maintenant, j’écoute les phrases de José Bedeur à l’archet dans la Margarine d’Hal Galper. C’est pesé, c’est livré, c’est servi chaud ! Jean Michel Van Schouwburg  – Jazz Around

La pochette de Water And Other Games a un look rétro qui de prime abord ne donne aucune indication sur le contenu musical du cédé qu’elle protège. En allant voir sur le site du leader, on apprend que Michel Mainil est passionné de jazz et qu’il en joue sur scène depuis fort longtemps. Après 32 années de musique live, l’homme sort enfin de l’ombre et, à 48 ans, décide d’enregistrer un disque. Le premier titre, le seul de sa plume, étonne d’emblée par le grain du ténor, l’aisance du musicien et ce son ample qui nous ramène quelques 40 années en arrière quand Rollins ou Coltrane, alors maîtres des forges, boutaient le feu à leur musique avec des airs de chaman. Le reste témoigne d’une science évidente du répertoire, Mainil reprenant à son compte le fameux Fee-Fi-Fo-Fum de Wayne Shorter (souvenez-vous : c’était sur Speak No Evil en 1964), Beatrice extrait du non moins fameux Fuschia Swing Song de Sam Rivers (1964), Nemesis emprunté à Dave Holland (Extensions, 1989), Monk’s Dream et quelques autres titres moins connus. Le pianiste Alain Rochette et le contrebassiste José Bedeur se fendent chacun d’une composition et le tour est joué. Enfin presque, car le cédé se clôture sur un When It’s Sleepy Time Down South qui vient rappeler avec élégance qu’on est là pour le plaisir avant toute chose. Et on s’amuse d’ailleurs beaucoup à écouter cette musique bien jouée avec beaucoup d’émotion et de respect. Ce disque nous incite même à retourner à la source et à ré-écouter ces classiques intemporels interprétés par leurs créateurs. C’est dire d’une autre façon qu’il apprendra à ceux qui le connaissent encore mal à aimer le Jazz. Si c’était là l’une des intentions de Michel Mainil, sa mission est réussie au-delà de toute espérance.  Pierre Dulieu – Dragon Jazz